
Je les ai connus bébés. Ils vivent dans mon immeuble. Ici, ils regardent passer les manifestations anti-CPE sur le boulevard. Voici donc Victor et Arthur.


 C'est le parfum que je vais porter, un jour. Je m'en approche doucement. Il est exceptionnel, et j'attends je ne sais quoi, d'être riche, sans doute, pour acheter enfin un vrai parfum Guerlain en extrait hors de prix. Sinon, quel intérêt? Je n'aimais pas les parfums Guerlain. Mitsouko me donnait des nausées. Shalimar des hauts-le-coeur. Petit à petit, je me rends. Je finirais par faire mon devoir et, en bonne Française, par ne fréquenter que les parfums Guerlain, exceptionnels, et extraordinaires, je le reconnais. Je commencerai par Chamade.







 Huummm...Un délice. Givenchy III appartient à la famille des sensations Diorella. Et comme Diorella, il devient difficile de le trouver. S'il n'y avait pas l'export, et les parfumeries pour touristes de la rue de Rivoli, je me demande si lamaison Givenchy, ou la multinationale qui possède la marque, ne l'aurait pas déjà supprimé. Rien de tordu-intéressant dans ce parfum. Juste du plaisir.
 Une rareté. Je ne sais pas s'il est encore possible de le trouver. Je me souviens que le découvrir a été une expérience violente. Je n'avais encore jamais rencontré un parfum comme ça, aussi riche et direct. J'ai acheté un flacon avec quelques hésitations. J'ai mis quelques temps à trouver la juste dose, car il contenait des risques de syncope et ne pouvait être porté dans un bureau. Trop... Trop tout. Puis je suis partie vivre en Angleterre. A l'époque, la maison de couture  qui a sorti Fashion, Léonard, était juste en train de sombrer dans la dé-mode, en dépit du nom de ce parfum. Je ne l'ai plus trouvé. Je me demande si, avec le retour en grâce de la griffe Léonard, ils ressortiront ce parfum.

 Au coude à coude, les deux eaux de toilette de mon adolescence. Elles sont toutes deux sorties à ce moment-là, et ont toutes deux obtenu un succès phénoménal, de ceux qui imprègnent tous vos souvenir. Je me souviens de m'être inondée d'Eau de Rochas, qui , à l'époque, se nommait Eau de Roche, avant de monter dans un avion de Abidjan à Paris. J'était grande, j'étais parfumée, je montais dans un grand avion. Décidément, les avions jouent un rôle dans mes histoires de parfums. O de Lancôme est le parfum que tout le monde portait, dans les années 70. Les mamans n'y trouvaient rien à redire. Il était délicieux et l'est toujours. C'est un plaisir offert, sans soucis, sans déception. Je me demande s'il est encore à la mode, s'il s'en vend encore. Voilà, ce sont mes parfums d'adolescente.

 C'est un parfum que l'on a choisi pour moi. Un amoureux, un jour, me l'a offert à la sortie de la boutique Duty Free de l'aréoport de Singapour, il y a très longtemps. Il pensait que les Françaises devaient forcément porter du Chanel et (heureusement), il n'y avait plus de N°5. Et il a eu raison de me le faire connaitre. Avec le 19, on se sent efficace, on pourrait même tourner arrogante, à la française. A part une brève escapade avec Coco ( à cause de Inès de la Fressange!), je n'ai jamais été cliente des parfums Chanel. Je l'aime comme un joli souvenir.
 Je ne l'ai pas porté longtemps. Le temps d'un flacon ou deux. Mais c'est un parfum extraordinaire, parfait. Juste le charme de ce nom, intraduisible: linges blancs? Lin blanc? La photo de la publicité ne lui rend pas justice. Rien à voir avec les Caraïbes. Plutôt avec un salon d'enfance, des souvenirs, un monde très beau, bien rangé, sans problèmes et sans poussière. J'ai lu, plus tard, une biographie d' Estée Lauder. C'est elle qui l'a inventé et imposé. Il a une perfection américaine. Ce n'est pas forcément un défaut.
 Habanita est une bombe, tout simplement. Créé dans les années 20, je l'ai découvert dans une vieille parfumerie, dans le 15e arrondissement, où la gérante attendait l'heure de la retraite en conservant quelques flacons noirs de ce fameux Habanita pour des clientes fidèles et aussi âgées qu'elle. C'est un parfum où l'expression "Je n'arrive pas à y croire" s'applique bien. Comment quelque chose d'aussi capiteux, lourd, peut-il être un tel délice à porter? C'est un parfum à fourrure. Un parfum d'hiver. Un parfum du soir. Je sais que des personnes assises à côté de moi, à portée d'Habanita, ont sombré dans une sorte de torpeur bienheureuse et bizarre. Mais c'est quoi, ton parfum, m'ont-elles demandé, un peu méfiantes. Un sortilège, donc.

Le premier qui me vient à l'esprit est Diorella, de Dior.Quelque chose de pimpant. C'est moi, ce parfum, jeune. J'en parfumais mon oreiller. Un jour, dans un avion entre Paris et New-York, une jeune fille assise à côté de moi (c'était son premier voyage aux Etats Unis), a sorti un flacon de parfum au moment de l'atterrissage, et s'est parfumée pour affronter cette aventure. C'était le mien, Diorella. Il va bien avec l'avion, le voyage, l'aventure, l'optimisme. Rien ne peut lui arriver.


