16 nov. 2006

Le bronzier



Dans notre immeuble, au rez-de-chaussée, se trouve l'un des derniers bronziers de France. On dit bronzier, et non bronzeur, pour les artisans du bronze. De ses ateliers sortent des Victoires en bronze pour les musées et des copies d'horloges Louis XIV (et successeurs) pour les émirats du Golfe. Les affaires ne marchent plus très fort, je crois. Parfois, quand la porte des réserves est ouverte, je salue les bustes des hommes célèbres qui attendent d'être reproduits en bronze, sur une étagère. J'ai eu une fois l'occasion de rentrer dans les caves de l'atelier. Je me suis mordu les doigts de n'avoir pas de caméra. Devant moi, j'avais tout un peuple de statues: des Jules Ferry, des Blum, des Mozart, des Républiques et beaucoup de bienfaiteurs de l'humanité. Autrefois, les mairies étaient de grandes clientes, pour les places de villages. Mais le bronze, c'est cher, difficile à entretenir, comme la soie ou le cachemire. J'ai peur que le peuple des statues, dans les caves, finissent un jour en automobiles chinoises ou locomotives indiennes, fondues pour la prosperité économique.

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